L’acier est circulaire, car il est entièrement recyclable. En outre, il peut être collecté, trié et recyclé à grande échelle et il y a une demande du marché pour ces recyclats. Malgré les éloges qu’on peut lui faire, l’acier semble toutefois toujours poser un problème de durabilité. Nous allons vous expliquer pourquoi la circularité totale n’est pas forcément totalement durable et pourquoi la circularité ne se limite pas au recyclage. Pedant notre journée technique le 9 mars aussi, nous approfondira le sujet.
Les cycles fermés sans impact n’existent pas, même pour l’acier
Si on peut le recycler sans perte de qualité, l’acier est-il pleinement durable ? Nous ne le pensons pas, et ce pour de bonnes raisons.
Lorsque des produits ou des composés métalliques sont mis au rebut, toutes les pièces métalliques ne partent pas toujours directement au recyclage des métaux. Parfois, les métaux sont contenus dans d’autres fractions, parfois les structures métalliques sont broyées en morceaux pour le transport, parfois les métaux sont déjà dans un état de corrosion avancé, souvent les consommables tels que les clous, les vis, les agrafes, les grilles de sablage, les électrodes de soudure, etc. sont perdus, parfois les copeaux, les tournures et les poussières de meulage ne trouvent pas la voie la plus optimale vers le recyclage, etc. Dans tous ces cas, il y a une forme de perte de matériau et de qualité.
Les pertes à la collecte seront très limitées. C’est le processus de recyclage même qui implique des pertes, surtout dues à la qualité de la ferraille, en raison par exemple des revêtements, du mélange de types d’aciers, des techniques d’assemblage inséparables, de la forme des fractions collectées, telles que les copeaux non compactés, etc. Ceux-ci ont un impact sur l’efficacité du recyclage.
Le niveau de collecte, le niveau de tri et l’efficacité du recyclage ne pourront donc jamais empêcher une perte sur la quantité d’acier en circulation. Il faudra donc toujours s’approvisionner en matières premières primaires, même avec un cycle fermé aussi parfaitement que possible. En ce sens, même l’acier ne pourra jamais être 100% circulaire.
Ce qui a encore plus d’impact, c’est l’énergie nécessaire pour fermer ces cycles. Chacune de ces étapes (collecte, tri, recyclage) nécessite de l’énergie. L’accent est évidemment mis sur la refonte dans le processus de recyclage. À court terme, il est peu probable que ce besoin énergétique puisse être couvert par les énergies renouvelables. Le processus de recyclage a donc un impact environnemental conséquent.
À titre d’illustration, donnons quelques valeurs exprimées en éco-coût (€/kg). Cette analyse d’impact simplifiée montre l’impact environnemental avec un seul score (voir également cette publication précédente) : pour l’acier (mix de marché avec 21% de matières secondaires), l’éco-coût est de 0,48 €/kg, pour les tubes et profilés en acier, il est de 0,5 €/kg. Les crédits pour le recyclage ne correspondent évidemment pas à 100% de l’éco-coût des matières premières brutes. Ils représentent moins de la moitié de l’éco-coût des matières premières, soit -0,2 €/kg.
Les cycles fermés sans perte et sans impact n’existent donc pas, même pour l’acier.
Malgré tout très important dans une économie circulaire grâce à d’énormes atouts
Si on considère que l’économie circulaire tend à « la préservation de la valeur des produits, composants et matériaux aussi longtemps que possible », les avantages de l’acier sont évidents.
Pour maintenir la valeur des produits, il est nécessaire de leur donner une longue durée de vie. Dans ce contexte, l’acier est un excellent matériau, qui convient parfaitement à la démarche circulaire. Cela nécessite non seulement une conception robuste, mais aussi des services axés sur la réparation, la réutilisation, le reconditionnement, etc.
Il s’agit donc d’utiliser les produits et les composants plus longtemps, mais aussi d’en tirer profit. Sans modèle de revenu adapté ou services supplémentaires, un produit en acier conçu pour la circularité n’est qu’une version coûteuse de ce produit. Inversement, les versions coûteuses sont souvent de meilleure qualité et ont donc potentiellement une durée de vie plus longue.
Pensez aux boîtes de vitesses, aux structures en acier pour la construction, aux roulements, à l’acier utilisé dans les transports (ferroviaires, routiers et fluviaux), etc., pour lesquels il existe de nombreux types de services, tels que l’entretien, la mise à niveau, la réparation, la remise à neuf et le reconditionnement. Ces services qui prolongent la durée de vie des produits génèrent également une valeur économique. Il s’agit d’exploiter la valeur ajoutée de ces services pour la conception circulaire.
Ces services ont pour effet de nous faire profiter plus longtemps des fonctionnalités des produits. On peut donc offrir une fonctionnalité plus longtemps avec la même quantité de matériau. Par exemple, une boîte de vitesses peut remplir sa fonction plus longtemps et donc apporter de la valeur. Le reconditionnement d’une boîte de vitesses a un bien moindre impact écologique (généralement environ 99% de matériaux primaires en moins et 85% d’énergie en moins) qu’une nouvelle fabrication à partir de matières premières. L’éco-impact sur la durée de vie totale (première et deuxième vies) d’une telle boîte de vitesses est donc beaucoup plus faible que la fabrication d’une nouvelle boîte de vitesses.
C’est pourquoi l’économie circulaire ne se limite pas au recyclage. Le recyclage est utile et nécessaire, et nous continuerons à l’améliorer, mais le véritable levier de la réduction de l’éco-impact par l’économie circulaire réside dans l’allongement de la durée de vie, en particulier pour les produits en acier.
Un produit n’est pas non plus circulaire en soi. Il est donc utile d’utiliser les produits, les composants et les matériaux différemment, de changer notre comportement. Ce n’est possible que si cela profite à l’utilisateur, ainsi qu’au producteur et au prestataire de services. Trouver ces avantages et répartir ainsi les coûts et les avantages tout au long de la chaîne de valeur, voilà votre défi circulaire.
Vous souhaitez en savoir plus sur ce sujet ? Le 9 mars 2023, Sirris organise une journée technique sur les essais de matériaux, qui portera également sur la circularité dans l’industrie métallurgique. Vous trouverez plus d’informations sur cet événement ici.