Bien que les AGV et les AMR soient susceptibles d’apporter des avantages significatifs sur le plan de l’efficacité et de la productivité, ces systèmes présentent aussi de nouveaux risques pour la sécurité qu’il convient d’aborder. Dans une série de blogues, nous allons étudier la sécurité des AGV sous plusieurs angles. Dans ce deuxième blogue de notre série, nous nous arrêterons sur le processus d’évaluation de la sécurité des systèmes AGV et AMR.
La présence de véhicules à guidage automatique (AGV) et autres robots mobiles autonomes (AMR) n’a plus rien d’exceptionnel au sein des unités de fabrication, d’entreposage et de logistique. Bien que ces véhicules soient susceptibles d’apporter des avantages significatifs sur le plan en termes d’efficacité et de productivité, ces systèmes présentent aussi de nouveaux risques pour la sécurité qu’il convient d’aborder. Dans une série de blogues, nous allons étudier la sécurité des AGV sous plusieurs angles : cadre législatif régissant celle-ci, cheminement vers la sécurité sur le plan des pratiques exemplaires, parties prenantes impliquées et leurs responsabilités respectives. Notre exploration approfondie de la sécurité des AGV nous livrera des informations précieuses quant aux défis et opportunités associés à ce domaine en pleine évolution.
Processus d’évaluation de la sécurité
Dans notre précédent blogue, nous nous sommes penchés sur le cadre législatif régissant la sécurité des véhicules à guidage automatique (AGV) ainsi que sur l’importance de leur conformité à la réglementation en vigueur. Cependant, leur conformité réglementaire ne suffit pas à garantir la sécurité totale des systèmes AGV. Pour garantir la sécurité, il est indispensable de procéder à une évaluation méthodique de la sécurité du système AGV considéré et de son environnement.
Dans ce deuxième blogue, nous nous arrêterons sur le processus d’évaluation de la sécurité des systèmes AGV, en ce compris les différents types d’évaluation de la sécurité, les facteurs à prendre en considération et les meilleures pratiques pour procéder à une évaluation complète de la sécurité. La compréhension du processus d’évaluation de la sécurité permet aux entreprises d’identifier les dangers potentiels et d’atténuer les risques, en améliorant de la sorte la sécurité et l’efficacité de leurs systèmes AGV.
Mandats des fabricants
La directive Machines réglemente les activités des fabricants de machines, des distributeurs et des fournisseurs de composants de sécurité. Elle précise les responsabilités essentielles que les fabricants doivent assumer pour garantir que les nouvelles machines sont conformes aux normes minimales de santé et de sécurité, protégeant ainsi les utilisateurs et les opérateurs. L'une des principales exigences pour les fabricants est de construire des machines intrinsèquement sûres, ce qui implique de revoir la conception ou de reconstruire les composants potentiellement dangereux afin d'éliminer le besoin de mesures de sécurité supplémentaires. Tout au long des étapes de conception et de fabrication, les fabricants doivent identifier et évaluer minutieusement tous les dangers et risques potentiels au moyen d'un processus complet d'évaluation des risques.
Le graphique ci-après illustre les phases à considérer lors de la mise en œuvre de toute mesure de réduction des risques pour le véhicule AGV/AMR considéré.
L’analyse des dangers et l’estimation des risques constituent généralement les premières étapes du processus d’évaluation de la sécurité. Toute évaluation des risques implique un processus logique d’identification et d’examen des dangers potentiels inhérents à la manutention de charges et auxquels le personnel est exposé. Ensuite, ces informations s’utilisent pour procéder à une évaluation des risques débouchant sur la prise de décisions portant sur la sécurité du véhicule et les mesures requises de réduction des risques. Dans le souci de faciliter ce processus, la norme ISO 3691-4 comprend une annexe B, laquelle présente un tableau répertoriant les sept types de danger (mécanique, électrique, thermique, matériel/substance, ergonomie, environnement d’exploitation de chariots industriels et combinaison de dangers) ainsi que leurs conséquences éventuelles et les exigences de sécurité requises. Ci-après figure une synthèse des dangers mécaniques, lesquels correspondent à l’un des types de dangers énumérés dans le tableau.
Lors de la seconde étape du processus d’évaluation de la sécurité, les exigences de sécurité requises sont définies en fonction des dangers identifiés et de leurs conséquences. La clause 4 de la norme énumère les exigences de sécurité requises ainsi que les mesures indispensables de protection/réduction des risques. Cette section fournit des informations détaillées concernant les exigences électriques, en se référant à la fois aux normes EN 1175 (exigences électriques auxquelles doivent répondre les chariots) et IEC 60204-1 (sécurité électrique des machines) ainsi qu’à d'autres normes actuelles régissant des équipements de protection tels que les protecteurs (ISO 14120:2015), dispositifs de verrouillage (ISO 14119:2013) et équipements de protection électrosensibles (IEC 61496 2:2013 & IEC 61496-3:2018). Outre la transmission hydraulique (ISO 4413:2010) et pneumatique (ISO 4414:2010), cette norme couvre d’autres aspects tels que le système de freinage, la régulation de la vitesse, le circuit d'arrêt d'urgence et la sélection de modes. Les conditions climatiques prises en compte dans cette section sont normales.
Pour assurer la sécurité globale d'un AGV, il faut impérativement tenir compte des relations existants entre les différentes fonctions de protection et mesures de sécurité pendant le processus de conception. Le système de commande d’un AGV/AMR joue un rôle crucial dans le contrôle de la vitesse, de la stabilité, de la charge et du pilotage du véhicule. Toutefois certaines de ses fonctions reposent sur le bon fonctionnement d’autres mesures de sécurité. Par exemple, le système de détection du personnel dépend du bon fonctionnement du système de freinage. La norme ISO 3691-4 spécifie diverses exigences de sécurité et mesures de protection à prendre en considération, telles que le système de freinage, la régulation de la vitesse, le circuit d’arrêt d’urgence, la sélection de modes et la conformité aux normes applicables aux équipements de protection tels que les protecteurs et dispositifs de verrouillage. Il est important d’acquérir une compréhension globale de ces exigences et de leur interdépendance pour assurer la sécurité globale du système AGV considéré. Le diagramme ci-après rend compte de la relation entre les différentes mesures de sécurité énoncées dans la norme ISO 3691-4.
La troisième étape consiste à définir, pour chacune des fonctions de sécurité spécifiées, un niveau de performance minimal par rapport au système de commande.
Visant à ramener le risque à un niveau acceptable, le niveau de performance minimal correspondant à chaque fonction de sécurité d’une machine est désigné par l’expression du niveau de performance requis (PLr). Pour définir le niveau de performance approprié en matière de sécurité, il faut tenir compte de la masse et de l'énergie de la machine. À titre d’exemple, un chariot de manutention transportant une charge lourde à grande vitesse requiert un PLr plus élevé qu’un chariot léger se déplaçant à vitesse réduite. La valeur du PLr applicable aux fonctions de sécurité sur chaque véhicule est susceptible de varier en fonction de l’application et du type de plate-forme mobile.
Il est capital d’appréhender le niveau de performance en matière de sécurité comme une « chaîne de sécurité » dont la résistance équivaut à celle de son maillon le plus faible. Par exemple, si une fonction de sécurité définie pour l’AGV considéré requiert un PLr minimum de niveau d, il faut que tous les éléments du système de commande associés à la sécurité comme les scanners laser de sécurité, les encodeurs, les pare-chocs, les automates programmables de sécurité etc., soient à même d’atteindre, voire de dépasser le PLr niveau d.
La norme ISO 3691-4 stipule que les éléments du système de commande associés à la sécurité doivent être au moins conformes aux niveaux de performance répertoriés au Tableau 1, section 4.11. Le tableau 1 présente un extrait portant sur deux fonctions de sécurité associées au système de freinage. La norme ISO 13849-1 requiert un PLr spécifique en fonction des risques associés. Les fonctions de sécurité N° 1 (« Système de freinage ») et N° 2 (« système de freinage de stationnement ») requièrent respectivement un PLr de niveau d et un PLr de niveau b.
La quatrième étape vise à s’assurer que les mesures mises en œuvre ramènent efficacement les risques de sécurité au niveau souhaité. Ce processus de validation implique généralement diverses activités telles qu’un examen visuel de l’AGV, l’exécution d’essais fonctionnels afin d’évaluer l’efficacité des mesures de sécurité, une réévaluation des risques après la mise en œuvre de ces mesures ainsi qu'une révision de la documentation. Pour s’assurer de la conformité aux exigences requises en matière de santé et de sécurité, il convient de respecter la clause 5 et l’Annexe E de la norme concernée.
Conformément à la norme ISO 12100, la fourniture d’informations utiles constitue l’un des pans essentiels de la conception de tout chariot industriel autonome. La fourniture d’informations utiles s’impose dans trois domaines majeurs : dispositifs de signalisation et d'avertissement, marquage, pictogrammes d’avertissement et plaques signalétiques, documents d’accompagnement tels que le manuel d'utilisation et consignes de mise en service du système. Ces dernières devraient inclure des informations relatives aux méthodes de mise en service, caractéristiques techniques, exigences de formation particulières et recommandations de marquage pour la mise en service et la prise en charge. Il convient de vérifier la conformité avec la Clause 6 de la norme ISO 3691-4 pour s'assurer que toutes les exigences en matière d’information ont été respectées.
Sécurité d’une application AGV dans un environnement spécifique
Obligations de l'employeur
La directive 2009/104/CEE relative aux équipements de travail définit les responsabilités des employeurs en ce qui concerne l'utilisation des machines et des équipements sur le lieu de travail. Étant donné que les machines peuvent présenter de nouveaux risques lorsqu'elles sont installées à l'endroit prévu, les employeurs sont tenus de procéder à une évaluation approfondie des risques dans leur environnement opérationnel, en tenant compte des exigences de l'installation et du milieu environnant.
Jusqu'à présent, nous avons discuté des mesures de réduction des risques associés au véhicule AGV en tant que tel, mais qu'en est-il de la sécurité de l’ensemble de l’application AGV, en particulier en cas d’installation dans un environnement spécifique ? Le fabricant d’AGV n’est pas en mesure de rendre compte de toutes les exigences de sécurité et, par conséquent, il est capital que les intégrateurs d’AGV respectent un certain nombre de bonnes pratiques lors de l'installation. Pour atteindre à un niveau de sécurité globale satisfaisant, il convient de procéder à une évaluation des risques après installation. L’intégrateur et l’utilisateur devront s’accorder sur les conclusions pour chaque application AGV. À cette fin, l’Annexe A de la norme ISO 3691-4 présente une classification comportant quatre types de zones d'exploitation des AGV en fonction des conditions de sécurité : zones d'exploitation, zones d’exploitation dangereuses, zones réglementées et zones confinées. La classification en zones dépend d’une part du dégagement entre le périmètre de l’AGV (ou de sa charge) et la structure fixe la plus proche et d’autre part de la présence d’un dispositif de détection relevant de la sécurité active et opérationnel dans le sens du déplacement.
Par « zone d'exploitation », on entend un espace présentant un dégagement minimal de 0,5 m de large pour une hauteur libre de 2,1 m de part et d’autre de la trajectoire de l’AGV ainsi qu’un système opérationnel et efficace de détection du personnel. Les trois autres zones sont classées comme des zones à risque croissant d’exposition d’autrui à un danger particulier.
L’annexe A spécifie les préparatifs indispensables pour éliminer les dangers dans chaque type de zone, y compris les marquages, protections, systèmes de verrouillage, itinéraires d’évacuation, etc. C’est à l’utilisateur et à l’intégrateur système qu’il appartient de désigner les zones dangereuses et/ou les zones réglementées durant les phases de conception, d’installation et de démarrage et de s’assurer qu’elles sont clairement identifiées en permanence par des marques au sol/plancher, des feux ou d’autres indications après installation.
Entre autres considérations importantes en matière de sécurité pour l'ensemble du système AGV, il convient de citer la prise de mesures de sécurité adéquates sur le lieu de travail (efficacité des dispositifs de protection, identification des points dangereux et manutention des charges), l’assurance que des équipements connexes tels que les convoyeurs portent la marque CE, la définition de règles d’exploitation en toute sécurité et la formation des opérateurs en conséquence, la mise en œuvre de mesures de mobilité et de commande des AGV, l’utilisation d’une signalisation appropriée et de systèmes d'avertissement, la définition des modes d’exploitation de l’AGV considéré, la conception des zones de chargement/déchargement, la mise en œuvre de meures d’arrêt d’urgence, le contrôle d’accès, la mise en œuvre de procédures de démarrage autorisées, l’évaluation des risques résiduels et la fourniture d’équipements de protection individuelle (EPI).
Pour conclure ce deuxième article de blogue, nous avons exploré le processus d’évaluation de la sécurité des systèmes AGV et souligné l’importance de procéder à une évaluation complète de la sécurité. Le processus d’évaluation de la sécurité permet aux entreprises d’identifier les dangers potentiels et d’atténuer les risques, en améliorant de la sorte la sécurité et l’efficacité de leurs systèmes AGV. Il faut impérativement tenir compte de divers facteurs dans le processus d’évaluation de la sécurité, au nombre desquels, l’environnement, la conception et l’exploitation du système. L’adoption d’une approche proactive de la sécurité permet aux entreprises de réduire sensiblement les risques d'accidents et de lésions tout en garantissant la conformité réglementaire.
Dans le prochain et dernier blogue de cette série, nous vous livrerons un bref aperçu des responsabilités de chacune des parties prenantes impliquées dans la sécurité des systèmes AGV, y compris leur fabricant, leur intégrateur et leur utilisateur final.
En tant qu’entreprise, comment évaluer les modalités d’un déploiement raisonnable des AGV ou AMR, et quelles sont les étapes que comporte un tel processus ? Contactez-nous!
Cet article est publié dans le cadre de l'Antenne-normes Industrie 4.0 et du project FlexIn²Log, qui vise à soutenir les entreprises manufacturières et leurs partenaires logistiques et ICT dans l'utilisation des technologies et des plates-formes numériques, mais aussi des AMR à commande numérique, pour accroître la flexibilité et l'efficacité de la logistique interne et entrante.