Au secours, la croissance de notre productivité est en baisse ! Quatre nouveaux conseils pour doper votre productivité (partie 17)

Pascal Pollet
La Belgique est le quatrième pays le plus productif au monde, mais la croissance de notre productivité décline. Dans cette série, nous vous proposons quelques conseils pratiques pour stimuler facilement votre productivité au bureau et dans l'atelier.

Dans la première partie de cette série, nous avons discuté en détail de la productivité des entreprises belges. Ces dernières années, la croissance de la productivité dans notre pays a pratiquement cessé. Si l'on en croit les chiffres de la productivité, la quatrième révolution industrielle ne semble pas donner les résultats escomptés pour l’instant. Si nous ne parvenons pas à inverser cette tendance, nous serons condamnés à travailler de plus en plus longtemps.

Pour aider les entreprises belges à améliorer leur productivité, nous rassemblons des conseils que nous publions régulièrement. Au cours de nos visites en entreprise, nous constatons en effet qu'il reste encore de nombreux enseignements exploitables. Ces conseils ne se concentrent donc pas sur la mise en œuvre de technologies de pointe, mais sur des améliorations facilement réalisables par tout le monde.

Conseil 71 : Optimisez les prix

 

(Source : https://www.pexels.com)

Le prix de vos produits détermine directement la valeur ajoutée (= ventes - achats), et donc votre productivité (= valeur ajoutée / heures de travail). Les achats représentant souvent une part importante du chiffre d'affaires, une faible augmentation de prix peut immédiatement avoir un impact majeur sur la productivité et la rentabilité. Par exemple, si les achats représentent les deux tiers du chiffre d'affaires, une augmentation de 1% du prix entraînera directement une hausse de 3% de la productivité. Une tarification adéquate est donc un levier pour optimiser votre activité. Malgré l'importance de la tarification, nous constatons que de nombreuses entreprises n'y sont pas particulièrement attentives. Le suivi des coûts fait souvent l'objet de plus d'attention que la détermination du prix correct.

Plusieurs indices d’une sous-évaluation des prix devraient vous inciter à tester une hausse de prix :

  • La demande est supérieure à votre capacité de production. On pense parfois, à tort, qu'il y a une pénurie de main-d'œuvre. Cependant, la loi de l'offre et de la demande veut qu'un type de tarification inadapté entraîne inévitablement un déséquilibre entre offre et demande. Une pénurie sur le marché du travail n'est pas « le problème », c’est simplement la solution à la problématique du chômage.
  • Les clients se plaignent rarement du prix ; en fait, vous perdrez peu d'appels d'offres à cause du prix.
  • Vous êtes moins cher que vos concurrents sans raison valable, ou vous offrez une valeur ajoutée évidente par rapport à vos concurrents pour un prix similaire.
  • Cela fait longtemps que vous n'avez pas adapté vos prix, et votre tarification est en retard sur l'inflation.
  • Vos prix sont basés sur le coût et non sur la valeur de votre produit.
  • Votre marge bénéficiaire est très faible.

L'augmentation des prix peut être une question sensible. Parfois, on peut craindre de perdre des clients. Diverses tactiques permettent d’y faire face :

  • Commencez par demander un prix plus élevé aux nouveaux clients.
  • Testez les augmentations de prix auprès d’une petite partie de vos clients. Si la majorité des clients accepte les augmentations de prix, vous pouvez les étendre aux autres clients.
  • N'accordez pas immédiatement de remise lorsqu'un client le demande ; réduisez les pourcentages de remise.
  • Différenciez davantage les prix en fonction de la valeur de votre produit ou service pour le client. Ainsi, un contrat de service a une valeur plus élevée pour un client dont le parc de machines tourne en continu. Certains clients seront également prêts à payer plus pour des délais de livraison plus courts.
  • Faites aussi payer les services gratuits au client.
  • Combinez la hausse de prix avec un petit plus pour le client qui n'a qu'un impact minime sur vos coûts. Par exemple, vous pouvez offrir une période de garantie plus longue si vous avez peu de coûts liés aux garanties.
  • Commencez par appliquer les augmentations de prix sur la partie la plus populaire de votre gamme de produits. Comme cette partie est manifestement la plus populaire, il est possible que les clients soient aussi disposés à payer un prix plus élevé.
  • Aux clients qui n'acceptent pas une augmentation de prix, vous pouvez proposer un produit alternatif, de moindre valeur, à l'ancien prix. Vous pouvez aussi aborder différemment ces clients en négociant des conditions de paiement différentes, un service moindre ou des délais de livraison plus longs en échange de l'ancien prix.

Il est probable qu'en demandant un prix plus élevé, vous perdiez quelques clients, mais ce n'est donc pas une mauvaise chose. Osez vous demander si ces clients sensibles aux prix sont ceux qu’il faut à votre entreprise. Les commerciaux de l'entreprise peuvent constituer une autre source de résistance aux hausses de prix. Pensez donc à lier leurs primes non plus à leur chiffre d'affaires, mais à la marge réalisée.

Conseil 72 : Améliorez votre agencement

Dans une enquête Sirris, 30% des personnes interrogées ont indiqué que l'agencement actuel dégradait l'efficacité de la production. Les nouvelles machines et les nouveaux postes de travail sont placés là où il y a de la place, sans tenir compte de la circulation optimale et des distances à parcourir. Par conséquent, la refonte de l’agencement de l’entreprise offre un grand potentiel de gain de temps. Un bon point de départ consiste souvent à réaliser un « diagramme spaghetti » sur lequel vous tracez les mouvements des personnes et des matériaux. Cela vous donnera rapidement une idée des améliorations possibles de votre agencement. Il peut arriver qu'il ne soit pas possible de trouver une répartition appropriée pour tous les flux. Dès lors, lors du réaménagement, concentrez-vous d'abord sur les flux principaux. 

 

Diagrammes spaghetti simplifiés avec indication des flux principaux et secondaires
(Source : Sirris)

Vous trouverez d’autres conseils sur l’optimisation de votre agencement ici.

Conseil 73 : Équilibrez le travail avec des « bucket brigades »

Nombre de tâches sont réalisées par un groupe de personnes qui doivent collaborer. Dans de telles situations, une perte de productivité peut survenir si le travail n'est pas correctement réparti entre les individus. Diverses techniques peuvent aider à mieux équilibrer le travail (voir aussi le conseil 59).

Les « bucket brigades » sont des systèmes auto-organisés, idéaux pour coordonner les travailleurs dans une ligne de production comportant plus de postes de travail que de travailleurs. La figure ci-dessous illustre le fonctionnement des bucket brigades. Une bucket brigade répartit les travailleurs entre les postes de travail (temps 1). Dès qu'un ouvrier a terminé les opérations à un poste de travail, il se rend au poste de travail suivant (t2). Lorsque le dernier ouvrier en bout de chaîne a terminé un produit (t3), il revient et reprend le travail de l'avant-dernier de la ligne. Celui-ci reprend à son tour le travail de son prédécesseur (t4). Cela continue jusqu'à ce que le premier ouvrier soit relevé, après quoi celui-ci peut commencer un nouveau produit au début de la ligne (t5).

 

Dans une bucket brigade, il n'est pas permis de dépasser des ouvriers sur la ligne de production. Si un ouvrier assiste l'opérateur suivant, il doit attendre que le poste de travail suivant soit vacant. Pour éviter cette situation, il est préférable de répartir les ouvriers sur la ligne en fonction de leur rythme. L’ouvrier le plus lent prendra la première place dans ce processus, tandis que le plus rapide prendra la dernière place.

Ainsi, les ouvriers d'une bucket brigade ne sont pas limités à un ensemble fixe de postes de travail ; ils doivent finaliser autant que possible chaque produit. Comme tous les opérateurs travaillent en permanence, la ligne est parfaitement équilibrée et le rendement est donc maximal. Dans les lignes de production classiques, la répartition généralement inégale du travail crée un déséquilibre qui contraint régulièrement certains opérateurs à attendre.

Les bucket brigades présentent plusieurs caractéristiques intéressantes :

  • Les règles sont simples et identiques pour chaque ouvrier. Ainsi, il ne peut pas y avoir de confusion sur les tâches à accomplir. Mieux encore, les responsables n'ont plus besoin d'intervenir activement pour répartir les ressources sur la ligne.
  • La ligne peut s'équilibrer toute seule, ce qui élimine le besoin d'études temporelles détaillées lors de sa conception. Ce n'est plus non plus le collaborateur le plus lent qui donne le rythme sur la ligne.
  • Les bucket brigades sont un moyen idéal d'intégrer efficacement de nouveaux travailleurs plus lents dans le processus de production sans créer de goulots d'étranglement. En outre, plus la différence de vitesse entre les ouvriers est grande, plus la ligne tendra vers l'équilibre et mieux le système restera équilibré.

Outre les applications en production, les bucket brigades sont aussi fréquemment utilisées pour répartir le travail de manière égale entre les préparateurs dans les entrepôts de distribution. La méthode traditionnelle de répartition du travail consiste à diviser l'entrepôt en zones et à affecter un préparateur à chaque zone.
Le problème d'un tel choix de zones est que le travail n'est pas nécessairement équilibré. Si on remplace la division en zones par une bucket brigade, il est possible d’atteindre une répartition équilibrée du travail. Le recours à des bucket brigades peut avoir un impact considérable. Ainsi, un centre de distribution a signalé une augmentation de 30% du nombre de préparations par personne grâce au passage aux bucket brigades. Vous trouverez plus d’informations sur les bucket brigades ici.

Conseil 74 : Réglez la température au bureau sur 21-22 °C

Dans les environnements de bureau, la température est parfois matière à débat. Pour l’un, il fait trop froid, tandis que pour l'autre, il fait trop chaud. Nous connaissons même une entreprise où les thermostats avaient été intervertis lors de l'installation. Lorsqu'il faisait un peu trop chaud dans une pièce, on y baissait légèrement la température, mais en raison de l'interversion, c’est la pièce voisine qui était refroidie ; les occupants de celle-ci avaient donc froid et augmentaient la température, si bien qu’il faisait encore plus chaud chez leurs voisins... Ainsi, un groupe transpirait toujours plus tandis que leurs collègues claquaient des dents.

Mais quel est au juste l'impact de la température sur la productivité ? De nombreuses expériences ont déjà été menées pour répondre à cette question. Une méta-étude a résumé les résultats dans la figure ci-dessous. Cette étude a montré que la température optimale se situe autour de 21-22 ⁰C. Dès que la température dépasse 25 ⁰C, on observe une baisse de productivité d'environ 2% par degré. Par exemple, à une température de 30 ⁰C, la productivité est inférieure de 9% à celle de la température optimale.

 

Relation entre productivité et température
(Source : Seppänen, 2006)

Mais que coûte le maintien de la température au niveau optimal ? Eh bien, le coût salarial des employés de bureau est généralement 100 fois plus élevé que le coût énergétique d'un bâtiment. Une légère amélioration de la productivité peut donc être rapidement récupérée. Ainsi, une étude a estimé que le coût d’une perte de productivité était sept fois supérieur aux coûts énergétiques. Les investissements dans une meilleure climatisation sont généralement récupérés en deux ans.

En conclusion

Si vous avez vous aussi des conseils, n’hésitez pas à nous les transmettre. Nous pourrons les partager et gagner en productivité tous ensemble. Le meilleur contributeur en la matière recevra un joli cadeau ! Nous tenons à remercier Jaap van Ede et Federico Brinchilin pour leur inspiration.

Vous trouverez ici une vue d’ensemble des autres parties de cette série de conseils.

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